C’est le 14 décembre 2014 qu’entrera en vigueur le nouveau plan de transport de la SNCB. S’il n’entend pas révolutionner les déplacements en train dans le pays, il a pour vocation d’offrir « une mobilité optimale et une ponctualité améliorée », dixit la SNCB.
Ce n’est pas la première fois que la SNCB donne un grand coup de balai dans son offre de trains. Les plus anciens se souviendront du fameux Plan IC/IR de 1984, qui a notamment introduit des cadences horaires, ou au pire bi-horaires, sur l’ensemble des lignes desservies. Ce Plan a fait l’objet de révisions en 1994 et en 1998. Les trains d’aujourd’hui roulent donc encore selon des schémas datant d’une quinzaine d’années. Entre-temps, le nombre de voyageurs a augmenté de façon substantielle, notamment en raison de l’engorgement des routes donnant accès aux grands centres urbains. En 1984, et dans une moindre mesure en 1994, l’introduction d’un nouveau plan de transport a signifié la disparition de nombreuses petites gares et points d’arrêt, voire la fermeture de lignes ou de segments de lignes (Braine-le-Comte – Enghien et Dinant - Givet, par exemple).
La SNCB avait initialement prévu de mettre en œuvre son nouveau plan de transport en décembre 2013. La mesure a été reportée d’une année, notamment en raison de la refonte des structures juridiques – la séparation effective entre l’opérateur ferroviaire (SNCB) et le gestionnaire d’infrastructure (Infrabel) prescrite par l’Europe – intervenue au 1er janvier 2014. Les mauvaises langues diront aussi qu’il est plus facile de faire passer une mesure à certains égards impopulaire à la suite d’élections législatives, surtout s’il faut à nouveau 500 jours pour constituer un gouvernement…
Ces dernières semaines, la SNCB a dévoilé les grandes lignes du nouveau plan à travers une série de « road shows » organisés dans chaque province à l’attention des décideurs locaux et associations de voyageurs. La communication au public ne devrait avoir lieu qu’après les grandes vacances, afin d’essayer de tenir compte des observations formulées par les participants aux road shows. Et il faudra s’attendre à des réactions houleuses de voyageurs ne comprenant pas pourquoi ils doivent changer leurs habitudes horaires, eux qui n’ont déjà pas été épargnés par les retards et annulations de trains ces dernières années…

(ci-dessus: L'automotrice 180 attend un départ pour Erquelinnes en gare de Charleroi-Sud le 23 septembre 2012. Cette automotrice a depuis été retirée du service et ferraillée.)
Malgré d’évidentes améliorations dans l’offre de trains sur certains parcours, trois aspects du plan 2014 ne devraient pas manquer de provoquer l’incompréhension chez certains. Il y a d’abord l’allongement des temps de parcours, au motif qu’il permettra une meilleure ponctualité générale. En décembre, il faudra compter 1 heure 4 minutes pour relier Bruxelles-Nord à Charleroi-Sud là où il ne faut que 55 minutes aujourd’hui (ou 58 si le train s'arrête à Marchienne-au-Pont). Ensuite, l’amplitude de l’offre quotidienne, à savoir l’écart de temps entre le premier et le dernier train du jour sur un parcours donné, diminuera parfois fortement sur certaines lignes. En clair, le ou les premiers trains du matin et le ou les derniers trains du soir seront purement et simplement supprimés en certains endroits. Enfin, là où certaines nouvelles relations apparaitront (dont un train Charleroi-Sud – Bruxelles-Luxembourg à cadence horaire en semaine, en plus des deux Charleroi-Bruxelles-Anvers par heure !), d’autres disparaitront ou seront scindées. Ainsi, on ne pourra plus se rendre de Tournai à Liège-Guillemins sans changer de train.
Si la SNCB utilise l’argument d’une « mobilité optimale » pour promouvoir son nouveau plan, on peut légitimement s’interroger sur sa conception de la mobilité dans les zones rurales. En supprimant plusieurs trains en soirée tant sur la ligne 130A (Charleroi – Erquelinnes) que sur la 132 (Charleroi - Couvin), elle condamnera les navetteurs de ces régions reculées à chercher des alternatives de transport. Et il y a fort à parier qu’ils ne prendront plus du tout le train, ni vers Bruxelles, ni vers Namur, ni vers Mons…
L’histoire, voyez-vous, est un éternel recommencement. Lors de l’introduction du Plan IC/IR de 1984, la SNCB tablait sur une augmentation de 9% du nombre de voyageurs par an. Au contraire, ce nombre diminua, stagna, et ne repartit à la hausse qu’à la fin des années 1990. A choisir entre des trains en retard et des trains qui ne roulent plus du tout, les voyageurs préféreront les premiers, quitte à grogner un coup.